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Kauffmann-Autoportrait

Connaissez-vous le peintre Angelica Kauffmann ? Cette femme peintre de la deuxième moitié du XVIIIe siècle a produit une œuvre abondante pendant un demi-siècle, travaillant pour les cours d’Italie, d’Allemagne, de Russie et la haute société anglaise et fréquentant l’élite artistique et intellectuelle de son temps. Pourtant, elle est aujourd’hui très largement méconnue.

Sa vie est un véritable roman. Fille unique d’un modeste peintre autrichien, elle connaît une ascension sociale vertigineuse. Elle va conquérir par son charme et son pinceau l’intelligentsia et la haute société en Italie puis en Angleterre, s’imposer dans un monde artistique dominé par les hommes et faire une très belle carrière de portraitiste et de peintre d’histoire.

Dès le plus jeune âge, elle manifeste un grand talent pour le dessin et la peinture si bien qu’à 14 ans, elle peint déjà le portrait de l’évêque de Milan lors d’un voyage en Italie avec son père ! En 1763, elle a 22 ans et s’installe à Rome où elle rencontre Winckelmann, l’antiquaire, archéologue et historien de l’art allemand à l’origine du néo-classicisme, dont elle peint le portrait. En 1765, elle est agrée à la prestigieuse Académie de Saint-Luc de Rome. Comme elle manie très bien la langue de Shakespeare, elle fréquente les membres de la noblesse anglaise installés à Rome ou à Venise qui lui commandent leur portrait. En 1766, elle se rend en Angleterre où elle restera une quinzaine d’années. Comme en Italie, elle se fait très rapidement remarquer et devient une portraitiste recherchée.

Cependant, comme le disait Mme de Staël, « la gloire elle-même ne saurait être, pour une femme, qu’un deuil éclatant du bonheur » (Corinne ou l’Italie, 1807). Cette femme qui n’était pas très belle mais pleine de charme et intelligente, séduisit de nombreux grands hommes (Goethe, Winckelmann, Joshua Reynolds, Canova…) qui firent son éloge. Pourtant, elle fut longtemps condamnée aux amours malheureuses. La rumeur lui attribue de nombreux amants (Joshua Reynolds l’aurait demandée en mariage, J.H Fuseli aurait été fou amoureux d’elle…) mais elle succombe surtout aux charmes de Marat, le révolutionnaire français poignardé dans sa baignoire par Charlotte Corday quelques années plus tard. En 1767, elle contracte un premier mariage voué à l’échec avec un aventurier peu scrupuleux qui se présentait comme le comte Frederik de Horn, un riche noble suédois mais qui était déjà marié au moins une fois et tenta de lui soutirer de l’argent. Ce n’est qu’à la mort de cet homme en 1780, qu’elle trouva enfin un certain bonheur conjugal auprès de son deuxième mari, un peintre italien, Antonio Zucchi.

Elle est morte à l’âge de 66 ans, le 5 novembre 1807, il y a exactement 206 ans aujourd’hui. Dans cet Autoportrait (1770-1775, Londres, National Portrait Gallery), elle se représente telle qu’elle souhaite passer à la postérité : une artiste, un crayon à la main, plutôt qu’une femme du monde…