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Piero della Francesca, Vierge de miséricorde, retable de San Sepolcro (1445-1462, museo civico di San Sepolcro)

Piero della Francesca, Vierge de miséricorde, retable de San Sepolcro (1445-1462, museo civico di San Sepolcro)

Une Vierge de miséricorde est une iconographie assez rare. La Vierge est représentée debout, de face, dans une position un peu hiératique. Ses bras en croix soulèvent les pans de son manteau, sous lequel sont représentés plusieurs personnages de petite taille, agenouillés en prière. La Vierge bienveillante semble leur offrir sa protection.

Cette iconographie de la Vierge trouve son origine dans une légende rapportée par un moine cistercien au XIIIe siècle. Un frère de Cîteaux aurait eu une vision au cours de laquelle il aurait été admis à contempler le ciel de gloire. Il voit alors des anges, des apôtres, des martyrs, des prophètes… mais aucun représentant de son ordre. Inquiet, il se tourne vers la Vierge pour lui demander pourquoi aucun cistercien ne participe à ces béatitudes. La Vierge lui répond qu’au contraire, les moines de Cîteaux lui sont si chers qu’elle les tient tout près d’elle. Elle écarte alors son manteau et le moine aperçoit une multitude de ses frères, blottis sous le son manteau.

C’est donc logiquement en milieu cistercien qu’apparaissent les premières représentations de la Vierge de miséricorde, au milieu du XIVe siècle. On les trouve à cette date essentiellement sur des sceaux de plusieurs abbayes cisterciennes. Elle permet de souligner la protection spéciale accordée par la Vierge à l’ordre de Cîteaux. Les autres ordres monastiques et en particulier les dominicains, jaloux de cette faveur, essayèrent de ravir cette légende aux cisterciens. Ils répandirent à leur tour des récits de vision dans laquelle la Vierge apparaissait protégeant les membres de leur ordre et contribuèrent ainsi à répandre l’iconographie de la Vierge au manteau.

La formule s’est ensuite appliquée progressivement aux confréries religieuses et enfin à la société tout entière venant se blottir à son tour sous le manteau virginal. Le thème de purement monastique est ainsi devenu progressivement universel et populaire. Des commanditaires laïcs se font représentés sous le manteau de la Vierge pour implorer sa protection. Il faut dire qu’un certain nombre de croyances étaient attachées au manteau de la Vierge au Moyen-âge. Celui-ci était en effet réputé protéger des flèches de la colère divine et notamment de celles, très redoutées, de la peste. Cette croyance se répand au XVe siècle, peut-être à la suite de prédications de saint Bernardin de Sienne. Pour échapper à la peste, on se réfugie sous son manteau, les hommes à sa droite et les femmes à sa gauche (ou parfois, les clercs à droite et les laïcs à gauche). La Vierge intercède ainsi auprès de Dieu pour apaiser sa colère et plaider la cause de tous.